La journée avait mal commencé, alors que depuis cinq mois, notre palmarès restait non sans fierté vide, j'ai du me résoudre à accepter l'insoutenable. Un Goanna (sorte de gros lézard de 80-120 cm) tenta une traversée de la route kamikaze juste au moment où nous arrivions plein tube. J'ai bien tenté une déviation de dernière seconde, mais le malheureux était trop avancé pour que je puisse l'éviter. Nous dûmes continuer la route le cœur gros -à l'instar de celui du lézard. Apparemment il fallait rattraper le temps perdu, car deux heures plus tard, c'est Cécile qui se fit bourreau d'un serpent aventureux... Pfff... On en est encore malade aujourd'hui. Enfin, c'est comme ça. Mais bon, cela mis de côté, revenons au sujet qui nous intéresse, nous voici donc au crépuscule de notre troisième étape, qui, nous l'espérons, va nous réconcilier avec le sommeil. Avide d'une douche et de la tranquilité pour dormir, nous avons quitté l'autoroute (entendez une nationale a une voie dans chaque sens), pour préférer un chemin de terre pour 4x4, afin de rallier le camping où nous logerons. Nous comptions sur 2-3 km de chemin, mais au bout de 35min, nous n'en étions toujours pas à bout. C'est dans le noir le plus total, après avoir scruté sur 40 km les bords du chemin des moindres vaches, wallabies et dingo susceptibles de se jetter sous nos roues que l'on frappa à la porte de la réception du camping. Ouf, on y est. Je ne vous redirai pas à quel point la chaleur, et l'humidité ont tôt fait de nous avertir que la nuit pourrait être longue. Néanmoins, après notre repas et notre douche salutaire, nous ne tardons pas à nous mettre au lit pour attendre que ce foutu marchand de sable nous en mette plein la vue. La chose arrive après deux trois heures très pénibles et nous profitons autant qu'on peut de nos songes tant attendus...
C'est alors que vers les trois heures du matin, je ne sais pour quelle raison, je me reveillai en sursaut (suite à un mauvais rêve je pense). En fait l'événement ne tient pas de mon réveil, mais bien de la suite. J'ouvre les yeux, et là, stupeur, devant moi se dresse de toute sa hauteur, un kangourou gigantor. D'abord surpris, je m'apercois que l'animal nous observe attentivement, le nez contre la moustiquaire que constitue la tente.
L'idée de me rendormir en etant l'objet du spectacle ne me ravit pas et je tente de mettre fin à la représentation en chassant l'intru d'un grand coup sur le côté de la tente. Une pâquerette sur un tank aurait eu plus d'effets. Le charmant ne bougea pas d'un cil. Intrigué, il se met à inspecter plus attentivement le contenu de la tente, à renifler, à attendre quelque chose que l'on ne compris pas.
Maintenant, Cecile (réveillé par mes grands gestes) est dans le coup, et après quelques veines tentatives de diversions pour écarter notre visiteur, nous décidons de l'aveugler avec notre lampe frontale (je tiens à signaler que le fait que la lampe soit frontale n'ajoute en rien à ce qui suit, c'est juste un état de fait). Malheur, je ne vis pas venir ce coup là. Plutôt que de s'écarter, horriffié par la lumière soudaine, le kangourou visiblement intrigué, tenta de s'approcher plus encore en posant ses deux pattes avant sur la moustiquaire et s'appuyant dessus. Il faut bien vous rendre compte de ce à quoi ressemblent des pattes antérieures de kangourou, si vous voyez "Shere Kahn" le tigre (cfr le livre de la jungle de Disney) déployant ses griffes devant Ka le serpent, vous n'êtes pas loin de la réalité.
Imaginez des lors une tente dôme avec un grand kangourou mâle (c'était indéniable) s'appuyant dessus, et à l'interieure de laquelle Cecile et moi aggrippons nos oreillers que nous brandissons contre la moustiquaire pour amortir les griffes du bestiau.
C'est dans ce moment de crise (je parle pour moi qui voyais déjà la tente en lambeaux), que Cécile me lance un : "Loulou, je dois faire super fort pipi!"
Ici, il faut ajouter un blanc.
"hein?!" dis-je incrédule.
"je sors, ça peut pas attendre"
Sur ce la voilà qui ouvre la tente comme si l'autre énergumène n'était pas là et s'en va, moi heberlué...
Le comble, c'est que le kangourou perd tout intérêt pour la tente et suit Cécile. De mon côté, après une minute de réflexion, je me dis que je devrais faire pareil, autant en profiter tant que notre geôlier n'est pas là. C'est en revenant que je découvre le kangourou à nouveau devant la tente, et Cécile en train d'attendre dans la voiture. Visiblement le coquin avait cru bon de jouer au garde du corps. Donc en revenant des toilettes, il avait suivi Cécile, celle-ci pour l'éviter avait tourné autour de la voiture une première fois, puis une seconde, mais toujours suivie et de plus en plus mal à l'aise, avait finalement pensé que m'attendre dans la voiture serait plus sécurisant. L'heure très matinale fait que je ne me souviens plus très bien comment nous sommes parvenus à ne pas nous retrouver à trois dans la tente, mais il s'en est fallu de peu. La photo ci-jointe devrais vous donner une idée de la situation.
Il y a un truc avec les kangourous qui est très perturbant, c'est un animal censé être gentil, mais il est doté de défenses naturelles très puissantes et avec ça on ne sait jamais dans quel état d'esprit il se trouve.il vous regarde d'un air suffisant qui désarçonne. Content? Pas content? Gentil? Pas gentil?
En conclusion : "quand Kangourou amoureux, lui toujours agir ainsi!"